Vincent Bariteau (Louvre Hôtels) : « nous avons rassemblé tous les aspects de la data »
Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance
Vincent Bariteau, Director of data and analytics de Louvre Hôtels Group, explique ici les approches de ce groupe international en matière de data. Il revient notamment sur la constitution du pôle data et les défis du plan stratégique à cinq ans.
Pouvez-vous nous présenter Louvre Hôtels Group ?
Louvre Hôtels Group est un groupe hôtelier disposant de toute la gamme, du une au cinq étoiles. Nos principales marques présentes en Europe sont Première Classe, Hosho (auberges de jeunesse), Kyriad Direct, Kyriad, Campanile, Tulip, Golden Tulip, Royal Tulip, Hôtels & Préférences… Historiquement, nous sommes issus de l’activité hôtelière du groupe familial Taittinger créée en 1976. Aujourd’hui, notre actionnaire unique est le groupe chinois Jin Jiang International mais Louvre Hôtels Group reste un groupe français.
Nous disposons aujourd’hui de 1700 hôtels et 150 000 chambres dans 70 pays.
Comment sont organisées les fonctions IT et data ?
Tout est géré au niveau groupe pour tous les pays, sauf la Chine. Au niveau de chaque pays, il reste une certaine autonomie pour la comptabilité et la paie, simplement pour respecter les contraintes réglementaires locales.
La responsabilité de l’ensemble de la data et de l’IT incombe à Nicolas Paepegaey, notre Chief Transformation Officer. Je suis directement rattaché à lui. Data et IT sont deux départements séparés depuis que le département data et analytics a été créé en 2021 avec les deux dimensions, l’IT et la BI d’un côté, les business analysts venus notamment du contrôle de gestion et du métier de l’autre. De ce fait, le département data et analytics a une vision 360° de l’ensemble de la data du groupe.
Cela dit, nous sommes tout de même organisés par grandes verticales : CRM/Marketing, hôtellerie, corporate (contrôle de gestion, ressources humaines…) et enfin une verticale plus technique qui est responsable des outils et des flux de données inter-applicatifs.
Quels sont vos grands choix technologiques pour gérer vos données ?
Fin 2022, nous avons migré nos bases de données sur Oracle Autonomous Cloud. Cette migration dans le cloud nous permet d’avoir une meilleure performance, de plus grandes accessibilité et flexibilité tout en bénéficiant d’une moindre complexité technique.
Pour l’heure, côté ETL, nous sommes toujours on premise avec une solution de Talend.
Et au niveau analytics, nous avons une pluralité de solutions (même s’il y a beaucoup de Business Object). Nous regardons actuellement à harmoniser nos solutions en basculant dans le cloud et en permettant le self-BI.
Lorsque l’on parle de data chez Louvre Hôtels, de quoi parle-t-on ?
En plus des données corporate classiques de toutes les entreprises (finances, RH…), ce sont nos données de référentiels : la liste des établissements avec, pour chacun, une description à jour. Quand les données sont bien à jour, cela permet une automatisation d’un certain nombre de procédures.
Et, bien entendu, nous avons aussi notre data de performance commerciale. 100 % de nos hôtels utilisent notre outil de réservation groupe et environ la moitié l’outil de gestion d’hôtel (les franchisés ont le choix d’utiliser ou non l’outil, plutôt destiné à l’Europe) : nous disposons ainsi d’une source de données claire pour tous les établissements et le détail de leur exploitation. Nous pouvons ainsi traiter de la saisonnalité, des liens entre types de consommation (chambre et restauration par exemple)…
Retrouvez Vincent Bariteau à la Nuit de la Data
Vincent Bariteau fait partie du jury des Trophées de la Nuit de la Data. Il assistera donc aux présentations des candidats ayant déposé un dossier le 18 janvier 2024 et vous la retrouverez à la cérémonie de la Nuit de la Data le 5 février 2024.
Et, du coup, vous utilisez ces données à quelles fins ?
Notre équipe de Revenu Management et de distribution analyse l’exploitation des outils pour définir du prévisionnel comme pour optimiser l’existant et sa vente. Bien entendu, les données clients sont traitées dans le CRM et nous travaillons notre connaissance client et notre programme de fidélité.
Dans le cadre de notre contrôle de qualité, nous réalisons une analyse sémantique des commentaires des clients autant qu’un traitement des rapports du contrôle de sécurité alimentaire et d’hygiène. En cas de besoin, nous déclenchons des plans de formation pour les personnes qui en auraient besoin.
Le reporting RSE est aussi aujourd’hui une obligation sur l’exploitation de nos établissements.
Enfin, historiquement, les données ressources humaines étaient traitées de manière très autonome localement mais, aujourd’hui, nous veillons à accompagner les responsables RH pour mieux traiter les données tout en respectant la législation. Nous analysons aussi au niveau groupe les données de paye afin d’optimiser les coûts.
Dans un groupe international comme le vôtre, quel est le poids de la réglementation sur les données ? Est-ce une gêne ?
Je n’utiliserais pas le mot gêne mais c’est évidemment une nécessité à laquelle nous devons nous conformer. Nous veillons à ce qu’il n’y ait aucun transit de données personnelles entre l’Europe et le reste du monde. Et la Chine est traitée à part.
Utilisez-vous des data tierces, par exemple de météo, pour optimiser votre prévisionnel d’activité ?
L’outil mis en place pour automatiser la gestion des ventes et optimiser les tarifs utilise des données et des algorithmes internes, sans recourir à de la donnée externe, du moins pour l’instant.
Nous utilisons de la donnée externe, collectée par des scripts automatiques, pour réaliser notre benchmark avec nos concurrents.
Dans un groupe hôtelier comme le vôtre, l’IA (intelligence artificielle) est-elle un sujet ?
Oui, c’est, dans l’absolu, un sujet mais, aujourd’hui, il n’est pas dans nos premières priorités. Nous voyons l’IA avant tout comme un moyen d’optimisation de nos processus. Par exemple, l’IA peut être employée pour une pré-validation dans un workflow d’approbation, y compris la vérification de la qualité des photos incluses dans notre banque d’images. Nos hôtels changent régulièrement les photos associées à nos établissements, même en dehors de toute rénovation, non seulement sur nos propres sites mais aussi sur les OTA (online travel agencies : Booking, Expedia…).
L’IAG pourrait être utilisée pour créer des contenus sur le web.
Quels sont vos projets ?
Le groupe a un plan stratégique à cinq ans global mais avec un poids particulièrement important en France. 80 % des hôtels vont être rénovés. Nous avons aussi une nouvelle stratégie de marques avec l’objectif d’être dans le Top 3 de chaque segment d’ici 2025. Nous allons créer 200 hôtels en France, 50 en Inde, 200 en Chine, 120 ailleurs dans le monde… Nous allons aussi améliorer les services offerts aux hôtels en mettant en œuvre une plate-forme numérique qui leur sera dédiée.
Bien entendu, il y a une déclinaison data à ce plan. Pour commencer, il s’agit d’optimiser les outils de pilotage. Mais, au-delà, à l’occasion d’un chantier de dix-huit mois, nous refondons nos systèmes et nous bénéficierons d’une meilleure alimentation en data. Nous allons en profiter pour refondre le Legacy et retravailler la gouvernance et la propriété de chaque système.
Enfin, à l’occasion de ce programme, nous allons aussi mettre en place le self-BI au bénéfice de ceux qui auront reçu la formation adéquate.
80 % des hôtels vont être rénovés.
Dans un groupe hôtelier comme le vôtre, bien connu, la guerre des talents data est-elle un sujet ?
Nous avons une équipe de 15 à 20 personnes. Nous avons notamment fait évoluer des collaborateurs internes du groupe. C’est formidable de pouvoir proposer ce type d’opportunité. Si nous avons un besoin, soit pour couvrir une masse de travail soit pour obtenir une expertise pointue, nous pouvons recourir à de la prestation.
Bien entendu, la fidélisation des équipes est primordiale et c’est une logique générale dans le groupe qui tient à toujours proposer des évolutions dans les missions, des formations, etc. Comme nous avons des missions variées, il n’y a pas de sentiment de monotonie ou de routine.
Quels sont vos principaux défis pour 2024 ?
Le plan stratégique est notre principal défi tant pour les chantiers que nous devons mener sur le socle data que pour notre contribution aux initiatives des autres départements du groupe.
Par ailleurs, le groupe va mettre en place un nouvel ERP. Cela va nous amener de nouvelles opportunités de traitements de données, bien sûr, en particulier en lien avec les données financières, mais cela va impliquer une refonte des connexions.
Podcast - Louvre Hôtels : la data au service de la stratégie à cinq ans.
Vincent Bariteau, Director of data and analytics de Louvre Hôtels Group, rappelle tout d’abord ce qu’est ce groupe hôtelier. Dans un contexte très concurrentiel, Louvre Hôtels Group a présenté un plan stratégique à cinq ans très ambitieux, tant d’un point de vue métier qu’IT. Bien entendu, la data a un rôle à jouer important dans ce plan stratégique.