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Emmanuel Dubois (Swiss Life) : « la data est un sujet métier »

Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance

Emmanuel Dubois, directeur de la gouvernance et de la qualité de la donnée chez Swiss Life, explique l’approche et la stratégie data de l’assureur.

Emmanuel Dubois est directeur de la gouvernance et de la qualité de la donnée chez Swiss Life. - © Républik IT / B.L.
Emmanuel Dubois est directeur de la gouvernance et de la qualité de la donnée chez Swiss Life. - © Républik IT / B.L.

Pouvez-vous nous présenter Swiss Life en France ?

Swiss Life France est une filiale à 100 % du groupe Swiss Life basé à Zurich. Nous sommes un acteur généraliste de l’assurance et de la gestion de patrimoine. Notre approche est globale en assurance-vie, banque privée, gestion financière, ainsi qu’en santé, prévoyance et dommages. En tant qu’entreprise responsable, nous sommes engagés dans une démarche de développement durable, dont l’ambition est de permettre aux générations actuelles et futures de vivre selon leurs propres choix.

Swiss Life France comporte 2 337 collaborateurs et s’appuie sur un réseau propriétaire de 532 agents et 371 conseillers commerciaux salariés. Il s’appuie également sur 6 595 courtiers et conseillers en gestion de patrimoine. Nous avons 264 000 clients entreprises (professionnels, entreprises, travailleurs non-salariés), 180 000 clients aisés (plus de 250 000 euros d’encours) et patrimoniaux (plus de 500 000 euros d’encours) sur un total de 1,5 million de clients. En 2022, le chiffre d’affaires en France de Swiss Life a été de 6,9 milliards d’euros.

Retrouvez Emmanuel Dubois à la Nuit de la Data

Emmanuel Dubois fait partie du jury des Trophées de la Nuit de la Data. Il assistera donc aux présentations des candidats ayant déposé un dossier le 18 janvier 2024 et vous le retrouverez à la cérémonie de la Nuit de la Data le 5 février 2024.

Toutes informations sur la Nuit de la Data et inscription

Comment sont organisées l’IT et la data chez Swiss Life ?

La stratégie du groupe est « multi-locale » : le développement du business, y compris l’IT, est local. Il existe des outils communs au niveau de la finance (SAP en l’occurrence). Nous avons un projet de refonte de cet outil et nous avons également des projets de solutions mutualisées au niveau groupe, notamment en ressources humaines (sauf la paie qui restera locale).

Historiquement, la direction data était rattachée à la division clients. Aujourd’hui elle incarne le volet Data de la division DSI & Data. Les choix technologiques sont sous la responsabilité de la DSI, la Direction Data étant consultée dans les choix de solutions et leur déploiement.

Notre périmètre actuel concerne à la fois les données clients et les données assurantielles. Soyons clairs sur un point : la data est, pour nous, un sujet métier. Le modèle de gouvernance en place repose sur la responsabilisation des métiers et sur la qualité de la donnée.

Me concernant, je suis en charge du Data Office central et, à ce titre, je veille notamment à la qualité, à la stratégie, etc. Les data scientists sont dans le datalab auquel s’adresse une communauté de data champions dans les métiers, en particulier les actuaires. Enfin, les data analysts, qui utilisent l’outil Tableau, sont répartis dans les différentes directions métier et animés au sein d’une communauté pour partager les bonnes pratiques.

En quoi consiste la data chez Swiss Life ?

En dehors des données corporate classiques, dans les données assurantielles, on a les données clients, les référentiels, les contrats, les sinistres… En tout, il y a huit domaines avec un data owner à chaque fois. Pour les données clients, je suis le data owner. Nous avons fait ce choix parce que je viens de la division clients et que c’est un sujet transverse central mais parfait également pour expérimenter les outils et approches destinés à être partagés.

Tous les assureurs sont de gros utilisateurs de données pour les calculs actuariels. Au-delà, quels sont vos usages en matière de data ?

La data science concerne de nombreux domaines d’usage. D’abord, il y a la lutte contre la fraude. Nous utilisons les outils data pour améliorer la qualité des données clients (avec un dédoublonnage par exemple). Le business développement (scoring, recommandation « next best product », churn…) est aussi un domaine important. Nous utilisons également les outils data pour la performance opérationnelle : automatisation de traitements de données simples par exemple. Cela permet aux équipes clients de se focaliser sur leur vraie valeur ajoutée.

Bien évidement, en matière d’analytics, nous avons de nombreux tableaux de bord et indicateurs pour de multiples usages.

Qu’utilisez-vous comme technologies ?

Nous avons migré notre plate-forme décisionnelle l’an dernier sur Snowflake sur AWS en ayant opté pour un chiffrement des données avec des clés détenues chez nous. La datascience repose aussi du stockage S3 chez AWS, là aussi avec chiffrement. En datavisualisation, nous utilisons Tableau, notamment l’app Tableau Embedded pour que tous les apporteurs puissent obtenir leurs indicateurs clés de performance (KPI). Pour la datascience, nous sommes plutôt utilisateurs de Python. Quant aux actuaires, ils utilisent pour l’essentiel du SAS Institute mais aussi de plus en plus du Python. 

Le recours à l’intelligence artificielle (IA) en général et à l’intelligence artificielle générative (IAG) est-il un sujet pour vous ?

L’intelligence artificielle est un sujet traité par notre équipe datascience.

Concernant l’IAG, la question n’est pas tant d’y aller ou pas mais dans quelles conditions et quand. Nous procédons à de l’analyse de risques avant de prendre une décision. Parmi les cas d’usage que nous avons identifiés, il y a la génération de code informatique, l’analyse documentaire (notamment les contrats avec les tiers), le conversationnel (notamment avec les clients)… Mais, pour l’instant, aucune décision n’a encore été prise.

Vous opérez dans un secteur très réglementé et la data est elle-même de plus en plus réglementée, justifiant des investissements. Toute cette réglementation est-elle plutôt votre amie ou votre ennemie ?

En fait, elle est plutôt mon amie !

J’ai vécu le démarrage de la mise en conformité au RGPD. A chaque fois, nous essayons de faire de la mise en conformité une opportunité. Nous ne voulons pas que la conformité soit un frein au business mais une manière intelligente d’en faire.

Prenons un exemple : la charte de la donnée partagée avec les apporteurs d’affaires. Le RGPD n’est pas un frein commercial mais nous permet d’avoir des données de qualité sans commentaires inappropriés.

Bien sûr, le zéro risque n’existe pas mais la conformité n’est pas un obstacle insurmontable. Même si la réglementation est de plus en plus complexe et s’il faut être vigilant pour éviter les non-conformités tout en évitant les surcoûts.

Nous travaillons avec pragmatisme sur des sujets tels que l’anonymisation des données et nous nous préparons aux prochaines évolutions (Data Act, DORA, etc.).

La guerre des talents est-elle un problème pour vous ?

Notre entreprise a une taille raisonnable, nous sommes capables d’offrir des conditions de travail agréables avec un niveau d’autonomie satisfaisant. Pour la population jeune, nous n’avons donc pas de soucis importants. Sur certains profils pointus (experts machine learning par exemple), c’est cependant plus compliqué. Mais nous n’avons pas plus de difficultés que les standards du marché. La conformité réglementaire est un sujet qui valorise bien l’entreprise.

Pour terminer, quels sont vos défis pour 2024 ?

Nous avons une feuille de route volontariste sur la connaissance client avec des décisions à prendre sur les bon cas d’usage, les bons socles techniques, etc.

De plus, pour accroître la performance économique, l’agilité des produits data est nécessaire. Et il nous faut aussi accroître l’industrialisation des traitements de cas d’usage en datascience.

Comme actuaires et data scientists sont deux métiers qui ont de plus en plus de choses en commun, nous réfléchissons à faire évoluer les outils pour les doter de solutions communes.

Podcast - Chez Swiss Life, data owners et data stewards sont dans les métiers

L’assureur Swiss Life a mis en place une gouvernance de la donnée s’appuyant sur la responsabilisation des métiers. En particulier, data owners et data stewards sont dans les équipes métier. Emmanuel Dubois, directeur de la gouvernance et de la qualité de la donnée chez Swiss Life, explique ici cette organisation.

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