Gaelle Vallée (Galeries Lafayette) : « après la relation client, la data optimise nos processus »
Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance
Gaelle Vallée, chief data officer de la branche Grands Magasins des Galeries Lafayette, explique l’approche data du distributeur.
Pouvez-vous nous expliquer votre rôle ?
Je suis chief data officer de la branche Grands Magasins des Galeries Lafayette. Cette branche comporte 57 magasins (Voir encadré). Le reste du groupe (comme La Redoute) ne fait pas partie de mon périmètre.
La fonction data est rattachée d’une part à Stéphane Zantain qui dirige la DSI, la supply-chain, la data et le digital, d’autre part à Matthieu Caloni, Chief Financial & Transformation Officer.
Le périmètre que je couvre comprend autant la data platform sous Google Cloup Platform que le décisionnel, le Product Ownership Data et la data science. Il s’agit donc d’aller de la couche technique à l’usage.
Par contre, la data analyse est portée par chaque métier même si j’anime la communauté des data analysts.
Les Galeries Lafayette en bref
La branche Grands Magasins du groupe Galeries Lafayette comprend 57 magasins Galeries Lafayette en France (dont 19 en propre) et 9 magasins à l’international (Luxembourg, Doha, Dubaï, Jakarta, Pékin, Shanghai, Shenzhen, Macao et Chongqing). Deux ouvertures sont prévues en Inde (Mumbai, New Delhi). Cette branche génère un chiffre d’affaires de 3,2 milliards d’euros (2024) dont 10 % en omnicanal.
Le « vaisseau amiral » du groupe est le magasin Lafayette Haussmann à Paris avec 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires (2024) et 30 millions de visiteurs de plus de cent nationalités par an (surtout Chine, Etat-Unis, Moyen-Orient et Asie hors Chine), ce qui en fait le deuxième lieu le plus visité de Paris après le Musée du Louvre.
Un plan d’investissement de 400 millions d’euros est programmé sur les cinq prochaines d’années avec trois tiers (le magasin Lafayette Haussmann, les autres magasins, l’IT).
Dans les grands magasins Galeries Lafayette, de quoi parle-t-on lorsque l’on parle de data ?
Bien sûr, outre les données classiques de toutes les entreprises, en premier lieu, il y a la data clients. Historiquement, la data est d’abord issue du marketing. Les données sur nos clients sont donc très riches et le travail sur celles-ci assez mature.
Depuis mon arrivée, j’ai étendu nos domaines de données à d’autres types d’activités afin d’avoir une approche data product également sur ces métiers. Le but est d’avoir des data products conçus pour répondre aux besoins métiers, tous les besoins métiers.
Pour commencer, il y a la data produits. Plus que la seule description des produits, c’est aussi l’ensemble des données sur leur gestion : comment on les achète, comment on les transporte, combien sont stockés et où, etc. Il y a donc notamment les données logistiques issues du WMS.
Il y a cependant un cas particulier qui est celui des « corners » détenus par les marques et sur lesquels le groupe touche une commission à la vente sans réelle vision des produits. Dans le magasin Lafayette Haussmann, les corners représentent 80 % de l’activité. Dans un corner Louis Vuitton, le personnel appartient à Louis Vuitton, le stock appartient à Louis Vuitton, etc.
Quels sont vos grands projets en matière de data ?
La data clients est bien travaillée depuis des années. Après la relation client, la data doit nous aider à optimiser nos processus internes. L’innovation sert la satisfaction client mais elle doit aussi servir nos processus métiers.
L’enjeu est d’améliorer l’activité au quotidien avec les outils les plus ergonomiques et efficaces possibles.
Et puis, d’une manière générale, il nous faut améliorer l’analyse de toutes les données, par exemple pour des optimisations sous contraintes en magasins ou en entrepôts.
Retrouvez Gaelle Vallée à la Nuit de la Data et de l’IA
Gaelle Vallée est membre du jury des Trophées de la Nuit de la Data et de l’IA. Elle va donc assister aux présentations des candidats le 15 janvier 2025 et interviendra à la cérémonie le 3 février 2025 au Théâtre de la Madeleine.
Et en matière d’IA et d’IAG ?
Nous avons plusieurs produits en production.
Tout d’abord, il s’est agi d’améliorer l’expérience client avec l’IAG. Nous avons ainsi créé un premier chatbot sur notre site e-commerce, GaLa (GAleries LAfayette), en remplacement de la foire-aux-questions. Nous y constatons 1700 conversations/semaine avec une bonne satisfaction.
Nous avons aussi recours à l’IA pour optimiser le taux de promotion afin d’écouler le stock mais aussi d’optimiser notre marge.
En matière d’IAG, nous avons deux approches.
Tout d’abord, cette technologie a du sens pour des usages quotidiens chez des collaborateurs qui en ont l’utilité. L’IAG transforme ces tâches quotidiennes. L’IAG peut nous permettre de gagner du temps sur la création de contenus. Mais viennent alors des questions comme : qui j’équipe ? Pour quels usages ? L’IA/IAG peut être native dans certains outils (Einstein dans Salesforce par exemple) ou bien nous pouvons utiliser Gemini au sein de la suite Google Workspace. Mais nous avons à bien expliquer aux collaborateurs ce que c’est, ce que l’on peut faire (ou pas), les risques à prendre en compte… Quand les explications ont été données, on peut ensuite se préparer à déployer des cas d’usage.
Nous avons d’ailleurs fait un forum avec nos partenaires (Salesforce, Google…) pour faire découvrir les technologies à nos collaborateurs. Ce forum a donné des idées de cas d’usage. Toujours sur ce forum, nous avions un stand dédié aux questions éthiques et juridiques. Il faut, d’un côté, convaincre ceux qui se méfient de bien utiliser et, de l’autre, faire comprendre aux utilisateurs volontaires comment bien le faire.
L’IAG peut nous servir autant au chatbot GaLa que pour générer des fiches produits. Nous avons créé une « usine à chatbot » avec ce premier cas d’usage pour le e-commerce. Maintenant, nous sommes capables de déployer en une semaine un nouveau cas d’usage. Par exemple, nous avons créé un chatbot pour une formation.
Quels sont vos défis pour 2025 ?
Il s’agit avant tout d’utiliser la data pour mieux répondre à nos enjeux business et de performance. Il faut que la data et l’IA nous aident à acheter les bons produits pour le bon magasin, avec une bonne optimisation du merchandising et de la logistique. Finalement, l’enjeu, c’est la data pour le coeur de métier.
Nos clients n’expriment pas d’attente vis-à-vis de l’IAG. Mais nous testons beaucoup. Notre coeur de métier reste le commerce physique.
Podcast - Comme toute IT, l’IA doit répondre à un besoin métier
Le groupe Galeries Lafayette possède un certain nombre d’enseignes (La Redoute…). Sa branche Grands Magasins est celle des établissements sous l’enseigne Galeries Lafayette. Gaelle Vallée, chief data officer de la branche Grands Magasins des Galeries Lafayette, explique ce que le groupe fait avec l’IA/IAG. Pousser des technologies très innovantes qui ne répondent pas à un besoin ou une attente n’est pas pertinent. Dans les faits, les clients ne sont pas nécessairement en attente d’IA.