François Lavaste (Tikehau Capital) : « depuis 2019, nous avons investi plus de 450 ME en cyber »
Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance
Gestionnaire d’actifs créé en 2004, Tikehau Capital gère 46 milliards d’euros d’actifs dont plus de 450 millions avec des fonds dédiés au domaine de la cybersécurité. François Lavaste, directeur exécutif chez Tikehau Capital, nous explique sa stratégie d’investissement dans les entreprises spécialisées. Membre du jury des Trophées de la Cyber Night, il assistera bien sûr aux présentations des candidats.
Pouvez-vous nous présenter Tikehau Capital ?
Tikehau Capital est un gestionnaire d’actifs « alternatifs », créé en 2004 à Paris où est toujours notre siège social. Les investissements dits « alternatifs » sont des actifs qui ne rentrent pas dans les catégories traditionnelles telles que les actions, les obligations ou les liquidités. Nous sommes cotés sur le marché réglementé Euronext à Paris, avons 46,1 milliards d’euros d’actifs sous gestion, et comptons plus de 750 collaborateurs répartis dans 17 bureaux dans le monde.
Tikehau Capital a développé des expertises dans quatre classes d’actifs : la dette privée qui permet aux entreprises d’emprunter dans des situations complexes ; les actifs réels et l’immobilier ; le private equity qui prend des participations en capital dans des sociétés non cotées ; et les stratégies de marché de capitaux ainsi que des stratégies axées sur les solutions multi-actifs et les situations spéciales.
L’indépendance stratégique résonne depuis la création du groupe chez Tikehau Capital. Nous finançons l’économie réelle, le tissu économique composé des petites et moyennes entreprises, ainsi que des industries stratégiques à travers par exemple nos fonds d’investissement en capital dans les domaines de l’aéronautique et de la cybersécurité, qui sont aujourd’hui les plus importants en Europe.
Nous avons par ailleurs été le premier acteur en private equity sur le sujet de la décarbonation avec le lancement d’une stratégie dédiée dès 2018, et le lancement récent d’un fonds dans le domaine de l’agriculture régénératrice. Début 2024, nous avons aussi lancé un fonds appelé « Tikehau European Sovereignty Fund » qui investit dans des entreprises européennes cotées qui contribuent au renforcement de la souveraineté européenne et au renforcement de la résilience du modèle économique européen en particulier en matière d’autonomie industrielle, de compétitivité digitale, d’autonomie en matière de santé, de défense et enfin de transition écologique.
Notre objectif est de créer de la valeur à long terme pour nos investisseurs tout en générant un impact positif sur la société.
En ce qui concerne notre stratégie d’investissement en capital dans la cybersécurité, nous avons été pionniers en lançant notre premier fonds en 2019 et avons depuis collecté plus de 450 millions d’euros pour investir dans le secteur.
Nous ne participons pas à l’amorçage, nous n’intervenons que lorsque l’entreprise a déjà démontré un modèle économique viable et accélère son développement, par exemple à l’international après un succès sur un premier pays. Nous avons d’ores et déjà investi dans une vingtaine de sociétés cyber.
Retrouvez François Lavaste à la Cyber Night
François Lavaste est membre du jury des Trophées de la Cyber Night. Il assistera donc aux présentations des candidats le 16 octobre 2024 et à la cérémonie le 25 novembre 2024.
Quels sont vos critères pour investir dans une société avec ce fonds cybersécurité ?
Le premier, c’est que la société doit avoir démontré que ses technologies ont des cas d’usage et des clients en plus d’être innovante. Comme je l’ai déjà dit, nous ne participons pas à l’amorçage.
Nous regardons également la qualité de l’équipe dirigeante et, le cas échéant, sa capacité à s’entourer lorsque c’est nécessaire. Nous voulons nous inscrire dans une ambition de croissance avec un succès international à partir d’un succès déjà acquis dans au moins un pays.
Cela implique que nous cherchons des entreprises avec un modèle économique qui a la capacité à être profitable (même si l’équilibre financier n’est pas encore atteint).
Quel est votre taux de succès ?
Sur la vingtaine d’investissements en cybersécurité déjà réalisée avec ce fonds, nous n’avons, à date, connu qu’un seul échec. Bien sûr, nous prenons des risques mais nous intervenons en capital development, pas en capital-risque.
Quelles sont les tendances que vous voyez en cybersécurité ?
Tikehau Capital se positionne essentiellement sur des tendances lourdes et durables (décarbonation, aéronautique…). La cybersécurité en fait partie parce qu’il n’y a aucune solution miracle alors que les usages se développent en continu et que le niveau de menace ne cesse de monter. Et les attaquants aussi innovent ! Il y a donc une course du chat et de la souris entre les responsables cybersécurité et les cyber-attaquants.
En Israël ou aux Etats-Unis, il y a beaucoup de fonds et des entreprises qui se développent beaucoup. Mais, en Europe, nous avons un déficit dans la taille et le développement de nos entreprises. Mais les opportunités sont fortes car les capacités technologiques sont bien là les opportunités sont fortes car les talents humains et les capacités technologiques sont bien là. Nous croyons en l’émergence de champions européens en cybersécurité.
Il existe d’autres fonds spécialisés dans l’amorçage et le capital-risque. Nous, nous arrivons après pour aider au développement mondial.
Du point de vue de ce fonds, quels sont les défis à relever pour 2025 ?
Le premier, bien sûr, c’est que les sociétés dans lesquelles nous investissons atteignent petit à petit le seuil de rentabilité.
Ensuite, il nous faut trouver les bons investissements pour les fonds que nous avons levés. D’autres fonds, pas nécessairement spécialisés, peuvent nous concurrencer. Nous pouvons hésiter, par exemple, à cause de doutes sur l’évolution de la pertinence de la technologie, sur la qualité de l’équipe… Nous investissons sur moins d’un dossier sur cent qui nous sont présentés.
Enfin, il ne faut pas rater les virages technologiques tels que les smartphones ou ChatGPT. Quand il y a une rupture, il ne faut être ni trop tôt (avec trop d’attente pour le développement) ni trop tard (plus de bonnes opportunités).
Dans les sujets actuels, citons par exemple l’informatique quantique et le chiffrement post-quantique. Il y a cinq ans, cela aurait été trop tôt pour nous. Un autre sujet est l’utilisation de deepfakes par les cybercriminels comme à Hong-Kong en début d’année. Pour l’instant, il n’existe pas de solution satisfaisante et ce serait couvrir un vrai besoin.
Podcast - La stratégie d’investissement en cybersécurité de Tikehau Capital
Tikehau Capital est un gestionnaire d’actifs alternatifs avec 46 milliards d’euros sous gestion. En 2019, il a lancé le premier fonds européen dédié au financement d’entreprises spécialisées en cybersécurité et gère à ce jour plus de 450 millions d’euros. François Lavaste, directeur exécutif chez Tikehau Capital, en est l’un des responsables. Il explique ici sa stratégie d’investissement.