Décideurs it

BPCE en route vers Orion, son futur SI unique

Par Bertrand Lemaire | Le | Cas d’usage

Le groupe BPCE a annoncé la mise en route d’un grand programme de refonte visant à créer une plateforme technique unique pour le groupe, Orion.

Ludovic Favarette est directeur du projet Orion de SI unique pour le groupe BPCE - © D.R.
Ludovic Favarette est directeur du projet Orion de SI unique pour le groupe BPCE - © D.R.

Le groupe BPCE rassemble les deux grands réseaux des Caisses d’Epargne et des Banques Populaires ainsi qu’une série d’établissements spécialisés ou à ciblage particulier (Crédit Coopératif, Banque Palatine, Crédit Foncier, Natixis…). Plusieurs regroupements successifs ont abouti, au fil des années, à créer deux entités dédiées à l’informatique du groupe : BPCE Solutions Informatiques (développement des solutions) et BPCE Infogérance & Technologies (production informatique). Mais il restait deux grandes plates-formes distinctes pour chacun des deux réseaux, interagissant chacun avec un SI groupe mutualisant certaines fonctions : Equinoxe (Banque Populaire) et MySys (Caisse d’Epargne). Dans le cadre du programme stratégique du groupe, Vision 2030, BPCE a annoncé la mise en place d’une nouvelle plateforme technologique commune pour l’ensemble du groupe dans un délai de quatre ans. Ce programme, baptisé Orion, est confié à Ludovic Favarette (voir encadré). Celui-ci entre au Comité Exécutif du groupe pour l’occasion, marquant la dimension stratégique d’Orion. Il est rattaché à Laurent Benatar, directeur général Technologies et Opérations de BPCE.

Bien entendu, cette nouvelle plate-forme technologique a des objectifs métiers tels que la modernisation des paiements, la digitalisation des usages, le développement de l’intelligence artificielle… sans oublier l’impératif de la cybersécurité. Mais il s’agit avant tout de réaliser des économies d’échelle. Une telle mutualisation permet en effet de concentrer les investissements et ainsi d’accélérer les projets. Le groupe insiste cependant sur un point très symbolique : « ce projet respectera l’identité des deux réseaux bancaires Banque Populaire et Caisse d’Epargne. » Concrètement, Orion se basera sur l’actuel SI des Caisses d’Epargne, MySys. Ce choix a été fait après une année de travaux préparatoires impliquant autant les équipes des deux réseaux que le groupe.

Schéma des systèmes d’information de BPCE avant et après Orion. - © BPCE
Schéma des systèmes d’information de BPCE avant et après Orion. - © BPCE


En savoir plus

- Communiqué « Le Groupe BPCE investit dans une plateforme technologique commune aux Banques Populaires et aux Caisses d’Epargne ».

Ludovic Favarette : un directeur de projet du sérail

Pour mener le projet Orion, extrêmement sensible et stratégique, BPCE a nommé un homme du sérail, Ludovic Favarette. Celui-ci a occupé de nombreux postes dans le groupe depuis vingt ans, tant dans une caisse régionale qu’au siège du groupe.

Titulaire d’une Maîtrise de Sciences de Gestion et d’un DESS (master) en système d’information et contrôle de gestion (2000), Ludovic Favarette a commencé sa carrière à la Société Générale au sein du contrôle de gestion et de la maîtrise d’ouvrage de la direction financière de SGCIB (2000-2004). Il a réalisé l’ensemble du reste de sa carrière dans ce qui deviendra en 2009 le groupe BPCE par la fusion de la Caisse nationale des caisses d’épargne et de la Banque fédérale des banques populaires.

Entré chez i-BP (filiale informatique des Banques Populaires, aujourd’hui intégrée dans BPCE-SI) comme chef de projet décisionnel et contrôle de gestion, il y évolue jusqu’à devenir responsable MOA en 2007. En 2011, il rejoint la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique (BPACA) comme Directeur Organisation et Qualité. Il y sera notamment Chief Digital Officer et, pour finir, Directeur Développement RH, innovation et Transformation. De 2019 à 2022, il occupe successivement deux postes au niveau groupe : Directeur Gouvernance et Démocratisation de la Data puis Directeur Relation Etablissements, Démocratisation et Support Data. De 2022 à 2024, il a été Directeur Général Adjoint Ressources et Transformation de BPACA. Il était à ce poste quand il a été nommé en janvier 2025 pour prendre la direction du projet Orion.

Et si la mutualisation devenait interbancaire ?

Les projets comme Orion sont des grands classiques dans les groupes bancaires qui, souvent, se composent de plusieurs réseaux. Au début des années 2010, le Crédit Agricole a ainsi construit NICE (Nouvelle Informatique Convergente Evolutive). Plus récemment, la fusion du Crédit du Nord et de la Société Générale s’est avant tout traduite par un projet informatique considérable dont le responsable est d’ailleurs devenu CIO groupe peu après. Il arrive également que certaines fonctions soient mutualisées entre plusieurs réseaux par ailleurs concurrents, par exemple la gestion d’actifs entre le Crédit Agricole et la Société Générale ou, en cours, la création d’un réseau unique de distributeurs de billets entre BNP Paribas, Crédit Mutuel et Société Générale. Mais la mutualisation pourrait-elle toucher le SI core banking ? La chose peut paraître un tabou tant une banque est avant tout un système d’information.

Interrogé sur le podcast « 2050 Investors » par Kokou Agbo-Bloua, Slawomir Krupa, Directeur Général du groupe Société Générale, a insisté, au-delà du pré-requis de base de la solidité en fonds propres, sur la nécessité d’investir fortement dans le numérique, notamment l’intelligence artificielle. Et, à la 37ème minute de l’épisode, il envisage l’apparition d’un géant technologique interbancaire qui pourrait ne dépenser que 15 milliards d’euros pour rendre le même service que le cumul estimé de 25 milliards d’euros de plusieurs acteurs. Ce mutualisateur porterait également, de fait, un certain nombre de contraintes réglementaires à la manière d’un éditeur de SaaS d’une fonction réglementée en entreprise (la paie par exemple). Slawomir Krupa est connu pour être obsédé par la baisse des coûts mais rien ne prouve qu’un tel projet pourrait être sérieusement envisagé dans un délai prévisible. Et lui-même ne semble pas y croire.