La numérisation des collectivités locales en marche
Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance
Le programme TNT (Transformation Numérique des Territoires) de la Dinum (Direction interministérielle du Numérique) a fait l’objet d’un séminaire de point d’avancement le 18 janvier 2023.
Prévu sur la période 2021-2024, le programme TNT (Transformation Numérique des Territoires) vise à appuyer, comme son nom l’indique, les collectivités locales dans la numérisation de leurs services pour les agents comme pour les citoyens. Le 18 janvier 2023, la Dinum (Direction interministérielle du Numérique) a accueilli un séminaire, la « Journée Numérique et Territoires », pour faire un point sur l’avancement du programme. Stéphanie Schaer, directrice interministérielle au numérique, a ouvert ce séminaire en se réjouissant notamment du dialogue développé, à l’occasion de TNT, entre les collectivités locales et les administrations centrales au niveau interministériel. Le financement de TNT par a fait partie du programme France Relance. « D’un montant de 90 millions d’euros, le fonds « Transformation numérique des collectivités territoriales » de France Relance a permis de financer des projets numériques dans plus de 3200 collectivités territoriales sous le pilotage de la Direction interministérielle du numérique, de l’Agence nationale de la cohésion des territoires et de la Direction interministérielle de la transformation publique. » précise le communiqué du ministère de la Transformation et de la Fonction publiques.
TNT est piloté par Patrick Ruestchmann, chef de la mission Transformation Numérique de l’État. Celui-ci a animé l’essentiel du séminaire. Sous l’égide de l’ANCT (Agence nationale de la cohésion des territoires), un incubateur a été mis en œuvre pour aider à construire des outils numériques libres et partagés. 42 projets ont ainsi été incubés avec un budget de 17 millions d’euros. Ces projets ont été choisis après une enquête de terrain approfondie auprès des collectivités afin de clairement identifier les besoins prioritaires de celles-ci et comment y répondre. L’ANCT ne s’est pas contenté de financer mais a effectivement accompagné de façon adaptée et personnalisée les collectivités porteuses de projets.
Accompagner les projets et s’assurer de leur possible généralisation
Au delà des fonds propres apportés, l’ANCT a donc fait des apports en expertises sur la réalisation de projets en open-source, comment réaliser de la mesure d’impact, les méthodes pour garantir l’accessibilité, etc. Parmi les contraintes évidentes, il s’agissait de s’assurer du meilleur emploi possible des deniers publics. Cela impliquait de favoriser la mutualisation entre les territoires. Pour le garantir, tous les projets devaient être réalisés en open-source. Le retour des collectivités sur l’accompagnement effectué est très positif, notamment sur la montée en compétences des équipes locales sur les sujets abordés.
Les 42 projets se doivent donc d’aboutir à des logiciels open-source déployables par d’autres collectivités que celles ayant initié les projets. Certains vont d’ailleurs faire l’objet d’un déploiement national avéré. C’est par exemple le cas d’une gestion des interventions techniques (par exemple : réparation de voirie) développée en premier lieu par la communauté d’agglomération de Poitiers. Le syndicat mixte Gironde Numérique, avec 18 agents, a réussi à déployer et opérer 4500 services partagés. Dans le cadre de TNT, Gironde Numérique a ainsi mis en œuvre, en pleine période de Covid, deux outils aujourd’hui largement diffusés : un pour gérer des alertes par SMS, l’autre pour mettre en place une gestion de documents numériques avec signature électronique.
Des services pour les agents comme pour les citoyens
Gironde Numérique a choisi un accompagnement global de l’ANCT. Pourtant, développer en open-source était une habitude déjà ancienne, avec une collaboration régulière avec l’Adullact (Association des Développeurs et des Utilisateurs de Logiciels Libres pour les Administrations et les Collectivités Territoriales). Mais, pour le syndicat mixte, il fallait avoir un œil extérieur pour mieux identifier les irritants des utilisateurs et les axes d’amélioration.
Parmi les autres projets, le Conseil Départemental de l’Isère a présenté « Salle sur demande ». Il s’agit là clairement de maximiser l’emploi du patrimoine immobilier des collectivités, en l’occurrence surtout les collèges avec leurs nombreuses salles, auditoriums, gymnases, etc. En effet, ce patrimoine est aujourd’hui peu utilisé hors du temps scolaire alors qu’il correspond à une forte demande des associations et des organismes de formation du secteur de l’économie sociale et solidaire. Le but de « Salle sur demande » est donc de faciliter les mises à disposition par une mise en relation entre l’offre et la demande, une digitalisation de la procédure et une automatisation maximale du conventionnement entre l’établissement concerné et l’utilisateur privé.
Agilité et open-source
Outre l’open-source, le développement de « Salle sur demande » a été réalisé en méthode agile afin de correspondre au mieux aux attentes métiers. L’innovation est à plusieurs niveaux. Technique, bien sûr, notamment avec une gestion du contrôle d’accès (les instructions sont envoyées afin d’éviter une présence obligatoire d’un agent de direction sur site). Mais surtout aussi juridique. Un gros travail a ainsi été réalisé pour que le bénéfice de chaque location puisse effectivement revenir abonder le budget de l’établissement bailleur. Le produit est aujourd’hui parfaitement opérationnel et peut donc être aisément utilisé par les autres départements.
Mais « Salle sur demande » pourrait également servir aux communes, y compris les plus petites, pour mettre à disposition de tiers non seulement les écoles primaires mais aussi, par exemple, les salles des fêtes. Pour ces derniers biens, des entreprises privées pourraient être candidates à la location de locaux. Le logiciel devrait faire l’objet d’évolutions afin de permettre une rémunération de la collectivité en nature, par échange marchandise.
De multiples axes d’actions
Sur un autre axe de TNT, deux vagues de lauréats (janvier et novembre 2021), 131 lauréats se sont partagés 23,5 millions d’euros. Les deux-tiers seront en production au premier semestre 2023 et font l’objet d’un suivi régulier. Quatre projets ont cependant été abandonnés parce qu’ils se sont révélés inappropriés : l’État a appris à ne pas s’acharner sur des projets en échec. De manière complémentaire, un guichet unique a été mis en place pour accompagner l’intégration de l’API de France Connect dans les applications locales. 523 entités en ont bénéficié (surtout des petites communes).
TNT a aussi permis la numérisation des procédures autour du RSA (comme la signature du contrat d’engagement réciproque) en Ardèche à partir du logiciel VieSion de Arche MC2. La région Bretagne, quant à elle, a mis en œuvre une GED, Collec-Data, issue notamment de développements opérés en Auvergne Rhône Alpes, et permettant le déversement des délibérations locales vers data.gouv.fr. Une autre procédure, pour répartir 34 millions d’euros, visait à faciliter le financement de projets locaux. Administré par les préfets à raison de 200 000 euros par département, ce fonds visait à répondre aux besoins très locaux pour améliorer les services tant aux agents qu’aux citoyens.
En fin de séminaire, Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, a présidé une réunion du programme TNT. Il copilote ce programme avec deux autres membres du gouvernement : Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, et Jean-Noël Barrot, ministre délégué en charge de la transition numérique et des télécommunications.