BNP Paribas multiplie les cas d’usage de l’IA
Par Bertrand Lemaire | Le | Cas d’usage
BNP Paribas a présenté à la presse une série d’usages de l’intelligence artificielle, notamment dans ses filiales Cardif et d’asset management.
Comme tous les groupes de banque et d’assurances, BNP Paribas gère, par nature, de très nombreuses et riches données. De la même façon, les activités du groupe impliquent de concevoir et utiliser de nombreux modèles mathématiques depuis l’origine. « Notre pratique de l’intelligence artificielle a donc commencé en départ lancé » a remarqué Renaud Dumora, directeur général adjoint du pôle investissement et services de protection de BNP Paribas, en présentant à la presse plusieurs projets le 19 juin 2024.
L’intelligence artificielle est une famille technologique qui, en entreprise, permet d’accroître considérablement l’efficacité. Elle peut ainsi, par exemple, améliorer le tri et l’affectation des e-mails ou faciliter l’extraction de données d’une masse de documents. Au sein du groupe BNP Paribas, l’intelligence artificielle a quatre grands objectifs : faire gagner du temps, optimiser les processus, mieux servir les clients et, bien sûr, aider les collaborateurs. Selon Renaud Dumora, le groupe a déployé 750 cas d’usage de l’intelligence artificielle avec un objectif d’un millier d’ici 2025. L’intelligence artificielle générative (IAG), technologie à la mode, ne représente qu’une centaine de ces cas d’usage. Bien entendu, BNP Paribas doit veiller à ce que tous les usages de l’intelligence artificielle respectent bien les contraintes de sécurité et de confidentialité propres au secteur bancaire ou assurantiel. En intégrant les actuaires de Cardif, la filiale d’assurances de BNP Paribas, le groupe comprend 700 data analysts et près de 400 autres acteurs de la data.
Souscrire une assurance et déclencher la garantie : l’IA en accélérateur
Chez BNP Paribas Cardif, justement, l’IA est d’abord utilisée pour améliorer l’expérience client. Cette filiale est spécialisée dans l’assurance, en général B2B2C avec plus de 500 partenaires dans le monde. Elle pratique notamment beaucoup l’assurance embarquée, c’est à dire l’assurance associée à l’achat d’un bien, typiquement un ordinateur ou smartphone. Parmi les contrats emblématiques, Cardif a un partenariat avec Orange pour un million de clients : le téléphone (pannes et batterie incluses) est assuré par le simple fait d’insérer en lui une carte SIM qui « porte » l’assurance. La promesse est forte : souscrire en trois minutes, déclarer un sinistre en trois minutes, réparer (dans une boutique de proximité) en trente minutes.
L’objectif de l’emploi de l’IA, dans le cas d’usage présenté, était de faciliter au maximum la souscription du contrat et le déclenchement de la garantie en cas de sinistre. Cela dit, Baptiste Auffret, directeur des partenariats affinitaires de BNP Paribas Cardif, l’a relevé : « l’IA permet de simplifier le parcours du client mais celui-ci a toujours le choix d’accepter ou de refuser le traitement de son dossier par ce moyen. » Quand le client remplit en ligne une déclaration de sinistre, si le client l’accepte, l’IA va analyser la situation et accepter ou refuser la couverture. Si l’IA refuse (le cas est trop complexe par exemple) ou si le client n’accepte pas l’IA, le traitement du dossier passe à un humain. « Nous acceptons neuf sinistres sur dix » indique Baptiste Auffret. Le fonctionnement du processus est assez classique puisqu’il s’agit simplement d’un traitement par scoring. Mais le dossier est ainsi tranché en quatre secondes… et le client reçoit dans la foulée un mail, éventuellement avec un lien pour prendre rendez-vous avec un réparateur de proximité.
Automatiser le traitement documentaire dans les enquêtes de satisfaction
Michael de Toldi, Chief Analytics Officer de BNP Paribas Cardif, a cependant pointé : « si on automatise avec de l’IA, il faut bien le faire sinon les clients sont furieux. » Cardif traite les polices de 80 millions de clients finaux dans trente pays avec un milliard d’interactions et cent millions de documents par an. Or, évidemment, Cardif se doit d’assurer la qualité parfaite de chaque interaction. « Nous avons de ce fait besoin d’automatiser » a jugé Michael de Toldi. Automatiser les processus, oui, mais pas tout pour tous. Michael de Toldi a ainsi relevé : « certains clients refusent d’avoir affaire à une IA, certaines situations exigent de l’empathie humaine ou d’autre sont trop complexes pour être traitées par une IA ».
L’un des usages de l’IA chez Cardif est d’automatiser le traitement de documents. En particulier, Michael de Toldi a mis en place de l’IA pour exploiter les verbatims des enquêtes de satisfaction. « Les informations y sont riches, massives et complexes pour bien comprendre ce que veulent les clients » a observé Michael de Toldi. Afin de garantir la confidentialité de ces données très sensibles, tous les développements ont été réalisés et sont opérés en interne. Deux traitements sont réalisés : d’abord du speech2text puis de l’IAG pour créer des synthèses de meilleure qualité ou rechercher dans les masses de verbatim un type d’information, par exemple la fréquence d’une demande ou d’un jugement. L’outil permet de retrouver une source d’un simple clic.
La gestion d’actifs augmentée à l’IA
Dans la gestion d’actif, la relation client est moins intense. BNP Paribas Asset Management gère des produits financiers (fonds communs de placements…) pour le compte de tiers, qu’il s’agisse d’institutionnels ou, en B2B2C, de particuliers clients de banques privées. Pour cette filiale du groupe BNP Paribas, l’IA est un outil pour apporter des conseils financiers personnalisés en utilisant des modèles comme le Multifactor Allocation. Celui-ci consiste à définir et respecter les critères stratégiques et les demandes de clients : niveau de risque admis, critères éthiques, etc. Les modèles statistiques classiques sont utilisés dans les cas simples, l’IA dans les cas plus complexes.
Et, surtout, l’IAG est utilisée pour créer du reporting personnalisé avec une explication détaillée sur les décisions prises et les résultats obtenus en adoptant le niveau de technicité adapté au client. « Obtenir un commentaire sur son propre portefeuille, pas un commentaire générique, constitue évidemment une forte amélioration de l’expérience client » a relevé Edouard Legrand, Chief Data Officer de BNP Paribas Asset Management. BNP Paribas a développé l’outil Addventa à cette fin et l’a ouvert en open-source. Nativement, cet outil est capable de générer des rapports en français et en anglais mais, évidemment, l’IAG permet aussi de réaliser des traductions. Lancé en décembre 2023, le produit a généré à ce jour 200 000 commentaires sur 350 dossiers. Edouard Legrand s’est aussi réjoui : « pour les gestionnaires, c’est aussi un gain de temps important car ils passaient des heures à réaliser des reportings. Par précaution, aucun rapport n’est directement communiqué au client : il y a toujours une relecture humaine par le gestionnaire. »