Comprendre l’IA pour sauver l’humanité

« Comment un monde de plus en plus technologique peut-il être un monde plus humain ? » Jean-Michel Blanquer, ancien ministre de l’Education Nationale, aurait ainsi pu écrire un sujet pour l’épreuve de philosophie du baccalauréat mais il s’est contenté de préfacer « Anti-manuel d’intelligence artificielle - Les nouvelles questions que pose l’IA ». Cet ouvrage vient d’être publié par Vladimir Atlani et Victor Storchan aux éditions Eyrolles. Oui, les auteurs assument pleinement, dans leur introduction, d’avoir écrit un livre de plus sur l’IA. Mais celui-ci, en bon « anti-manuel », ne cherche pas à donner un mode d’emploi technique. Il cherche à faire réfléchir sur les implications concrètes du développement de l’IA dans les entreprises et, plus largement, dans notre société. Il s’adresse donc davantage aux décideurs (en entreprises comme politiques) qu’aux experts. Les auteurs avertissent : « La loi de Roy Amara, technologiste américain, nous l’enseigne : nous avons tendance à surestimer l’effet d’une technologie à court terme et à le sous-estimer à long terme ». Leur ambition est de remettre l’église au centre du village et d’expliquer les enjeux à chacun.

Les deux auteurs ont des profils complémentaires. Victor Storchan est ingénieur en intelligence artificielle. Il a travaillé dans des banques d’affaires comme dans des groupes informatiques. Il est actuellement responsable de la recherche en intelligence artificielle et en apprentissage machine au sein de la Fondation Mozilla. De son côté, Vladimir Atlani est certes ingénieur de Centrale-Supélec mais a des expériences surtout dans le conseil (notamment au sein de McKinsey) et l’enseignement. Il est maître de conférence à Science-Po et dirige aujourd’hui Stamp Education.

Du quotidien à l’Histoire

Même si l’IA, en général sous la forme de l’IAG, est entrée dans notre quotidien à tous, chacun n’est pas parfaitement informé de ce qu’est l’IA. Même si cet ouvrage est loin d’être le premier à vouloir vulgariser le sujet, les auteurs prennent le temps d’expliquer les principes fondamentaux du sujet. Ainsi, par exemple, ils rappellent « l’intelligence de la machine est toujours d’origine humaine. » Lorsqu’une IA bat quinze des meilleurs spécialistes d’un domaine, elle s’appuie sur l’expertise et l’expérience de dizaines de milliers d’experts ainsi que sur une puissance de calcul et de traitement de données bien au-delà de la capacité d’un cerveau humain. L’apprentissage de l’IA acquiert ainsi une importance fondamentale, ce que Microsoft a appris à ses dépends en laissant discuter Tay, une pseudo-adolescente virtuelle, avec des internautes : quelques heures ont suffi pour la rendre complotiste et raciste.

Ainsi, si les auteurs balayent de nombreux sujets et y étudient les impacts de l’IA, sur le sport, la santé, le travail, la politique, etc., ils veillent à être toujours parfaitement clairs pour les béotiens et à illustrer leur propos d’anecdotes pour bien faire comprendre aux lecteurs leur sujet, de l’histoire de Tay à l’affrontement de Deep Blue et Kasparov en passant par Napoléon. A cela s’ajoutent des résumés en fin de chapitre. L’ouvrage s’achève sur des perspectives et, plutôt que des « solutions » indiquées dans le titre, des recommandations. Cinq recommandations en matière d’éducation achèvent ainsi l’ouvrage : revaloriser l’enseignement des compétences nécessaires à la société, consacrer l’importance du savoir pour le savoir et du raisonnement pour le raisonnement (c’est à dire préserver l’esprit des Lumières pour ne pas être abrutis par l’IA), former aux métiers utiles aux entreprises avec suffisamment d’agilité pour coller à la demande, utiliser l’IA pour apprendre et, enfin, évidemment, éduquer aux enjeux de l’IA.

A propos de l’ouvrage

« Anti-manuel d’intelligence artificielle - Les nouvelles questions que pose l’IA », par Vladimir Atlani et Victor Storchan (Editions Eyrolles, 192 pages, 22 euros).

Préface de Jean-Michel Blanquer, ancien ministre de l’Education Nationale.

Pour acquérir l’ouvrage chez l’éditeur.