Aurélien Barthe (MGEN) : « l’IA éthique et sécurisée est au service de notre performance »
Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance
Première mutuelle des agents du service public, MGEN a transformé son modèle avec la réforme de la PSC. Data et IA soutiennent directement cette évolution comme le rappelle Aurélien Barthe, CDO de MGEN.

Pouvez-vous nous présenter MGEN ?
Fondée en 1946, MGEN est la première mutuelle des agents du service public. Sa position est unique puisqu’elle assure, d’une part, par délégation de la CNAM, le régime obligatoire de l’assurance maladie, d’autre part, la complémentaire santé et la prévoyance (y compris l’assurance retraite et l’assurance pour les animaux domestiques) pour plus de 4,5 millions d’adhérents.
Nous comptons environ dix mille collaborateurs dont 5500 dans la partie assurantielle et 4600 dans les établissements de santé que nous gérons. Concernant ces derniers, il s’agit de 35 sites et 61 établissements qui vont prochainement être regroupés avec tous les établissements du groupe Vyv auquel nous appartenons aux côtés de MNT et de Harmonie Mutuelle.
Comment s’organise la data et l’IT au sein de MGEN ?
La Direction Data est rattachée côté métier au membre du Comex en charge du marketing, de la distribution, du digital, de la prévention et de la data.
La direction data collabore évidemment au quotidien avec la DSI, notamment la « DSI data », notre partenaire technique, de la construction du socle technique à la co-construction de l’Académie Data et IA.
Cette dernière a été constituée pour former des collaborateurs actuels du groupe, pour permettre d’acquérir de nouvelles compétences clés sur la Data et l’IA voire d’envisager une complète reconversion. L’objectif est de disposer en interne des compétences pour réussir sur la data et l’IA.
La direction data comporte quatre piliers. Tout d’abord, la stratégie Data et IA avec un aspect autonomisation des métiers. Ensuite la qualité de tout le patrimoine de données. Nous avons pour y arriver un volet gouvernance des données, permettant de disposer des relais humains au service de la qualité des données. Enfin, nous pilotons les usages data et IA au service de l’entreprise.
La « DSI data », donc, est notre partenaire technique stratégique. Elle met en place et gère au quotidien les socles techniques data et IA pour permettre nos usages.
Retrouvez Aurélien Barthe à la Nuit de la Data et de l’IA
Aurélien Barthe est membre du jury des Trophées de la Nuit de la Data et de l’IA. Il a donc assisté aux présentations des candidats le 15 janvier 2025 et interviendra à la cérémonie le 3 février 2025 au Théâtre de la Madeleine.
Quelles sont les données sur lesquelles vous travaillez ?
Notre périmètre est l’ensemble du patrimoine de données : contrats, clients, prestations… sans oublier toutes les données classiques de toutes les entreprises (finances, RH…).
Les données relatives au régime obligatoire comme au régime complémentaire de protection sont souvent d’une haute sensibilité. MGEN est elle-même certifiée HDS (hébergeur de données de santé). Nous sommes également partenaires de S3NS (Thalès-Google) parce que nous avons besoin, lorsque nous recourons au Cloud, d’un hébergement souverain. Nous stockons nos données dans nos propres datacenters et nous avons une stratégie cloud souverain en cours de déploiement pour certains usages, comme l’IA.
Et quels sont vos usages ?
Nous avons deux grandes familles d’usages : l’opérationnel (à chaud) et le décisionnel (à froid, analyse).
Côté décisionnel, on peut citer : le pilotage commercial, le pilotage technique et financier (actuariat…), le reporting réglementaire, les études statistiques (y compris pour la prévention santé), le marketing opérationnel…
Et côté opérationnel, citons le pilotage des centres de services (comme le front client omnicanal) avec l’objectif d’une amélioration continue de la qualité de service. Ces centres de service sont à 100 % en France.
Par ailleurs, nous avons aussi une fondation qui réalise des études de santé avec une optique plus long terme.
En quoi consiste la réforme de la PSC et qu’implique-t-elle en matière de data ?
La réforme de la PSC (Protection Sociale Complémentaire) des fonctionnaires est très importante dans notre domaine.
Actuellement, nous gérons le régime obligatoire pour l’Education Nationale, l’Enseignement Supérieur, la Recherche, la Culture… Le régime complémentaire est une option individuelle. Nous sommes référencés dans les différents ministères et administrations des domaines cités mais les contrats sont individuels, B2C.
Demain, chaque ministère va prendre en charge 50 % de la mutuelle (régime complémentaire) qui va donc devenir obligatoire. Le choix de la mutuelle se fera sur appel d’offres mené par chaque ministère. Les contrats seront donc collectifs.
Du point de vue de la data, cela nous amène à gérer un nouveau modèle de données et un nouveau back office technique. Nous avons mené d’énormes travaux de refonte en trois ans afin d’aboutir à de nouveaux socles clients centrés. Nous continuerons les usages décisionnels et opérationnels actuels dans le nouveau cadre mais nous aurons aussi de nouveaux usages. Par exemple, nous aurons un suivi et du pilotage d’affiliations en masse (il s’agit de pouvoir affilier jusqu’à plusieurs millions d’adhérents en une fois).
L’arrivée du collectif augmente encore d’un cran les exigences en qualité de données pour être à même de fournir en temps et en heure et en qualité les reportings demandés par les employeurs.
La migration vers le régime post-réforme va être progressif.
La data et l’IA sont clés au service de la connaissance client & de l’expérience client, de leur satisfaction, au sens clients protégés et employeurs, et au service de notre développement.
Est-ce que cette réforme vous amène à développer les usages de l’IA ?
Nous n’avons pas attendu la réforme PSC pour faire de l’IA ! Mais l’IA nous permet de baisser les coûts (excellence opérationnelle), de garantir une excellence technique (lute contre la fraude, détection des anomalies dans les actes de praticiens…) et d’accroître notre chiffre d’affaires (développement de la connaissance client pour proposer des offres adaptées…).
Bien sûr, nous avons déjà des usages opérationnels de l’IA. Par exemple, nous avons 1,5 million de mails entrants triés et orientés vers les bons interlocuteurs.
Nous avons aussi une visualisation des interactions clients en omnicanal sur un thème donné. Nous avons ainsi divisé par trois le stock de relances clients.
Quels sont vos autres projets en cours ?
Nous voulons former toute l’entreprise à l’IA, et démocratiser l’IA dans toute l’entreprise.
A la mi-2025, nous aurons la deuxième promotion de l’Académie Data et IA.
Nous avons monté un Centre d’Excellence Data & IA (CEDIA) en partenariat avec la DSI et la DRH. Celui-ci a vu en 2024 la mise en place en place d’une offre de formation complémentaire à celle de l’Académie Data & IA et accompagne les métiers sur leurs projets Data & IA pour aboutir à l’autonomie de chaque direction métier. En un an, nous avons ainsi accompagné une vingtaine de personnes et formé, dans l’académie, une quinzaine de collaborateurs. Le CEDIA a accompagné, en termes d’expertise, treize projets, seize sont planifiés .
Nous voulons aussi déployer l’IAG, mais pas n’importe comment et surtout pas au prix de la sécurité et de l’éthique,.et testons plusieurs cas d’usage, notamment au service de la relation adhérent.. Notre IAG est hébergée chez S3NS. Nous nous assurons par design d’embarquer nos métiers dès le début des projets, et de toujours garder l’humain dans la boucle pour s’assurer que nos IA répondent toujours à nos exigences.
Nous avons posé une gouvernance IA en interne car nous voulons des IA conformes et éthiques dès la conception.
Enfin, quels sont vos défis pour 2025 ?
Côté data, nous voulons accélérer l’autonomisation des métiers sur la Data et l’IA, notamment en formant encore plus et en rendant les informations sur nos données encore plus accessibles en interne. Notre but est également de poursuivre nos travaux sur l’excellence de la qualité des données et de multiplier par trois les relais data métiers et DSI, tout cela au service des usages Data et IA.
Podcast - MGEN : Un centre d’excellence pour doter les métiers de services data et IA
Le CEDIA (le Centre d’Excellence Data & IA) de MGEN, co-construction Direction Data - DSI Data - RH, a été mis en place pour délivrer des services aux métiers, notamment de formation, en matière de data et d’IA. Aurélien Barthe, CDO de la mutuelle, le présente ici. Il s’agit d’autonomiser les métiers autant en formation, via l’Académie Data et IA, qu’en accompagnement des projets.